MEETING SUR LA DEMOCRATIE
15 Juillet 203
Pour son son deuxième meeting de cet avant dernier jour de campagne, George Edouard avait décidé de se rendre dans la région où Cécile Rossignol était-elle-même venue la veille : une région éminemment à droite, où La Ligue Républicaine et le Parti Populaire se mêlaient à une lutte farouche pour la gagne : la région de Brifalle ! Plus précisément, George Edouard se lançait dans la ville de Londal, et dans un lieu que Zimmerman convoitait avec un certain talent.
Cette région, longtemps négligée par la gauche et – légèrement – méprisée, était tombée dans un cercle absolument ravageur et dangereux au point que désormais, le Parti Populaire était en passe de s’imposer sur le territoire. L’autoritarisme, le parti de la haine allait peut-être gagner !! La faute à une droite bien trop complaisante, à un centre droit ne s’opposant pas suffisamment fort et à un centre-gauche préférant attaquer la gauche, plutôt qu’invectiver le véritable ennemi.
Et finalement, l’Union des Gauches aussi était responsable du drame annoncé ! En effet, cette union n’a pas assez marqué ses idées dans ce territoire, préférant éviter de s’aventurer dans des lieux peu propices. C’est donc une erreur collective qui doit impérativement être corrigée, en déplaçant un minimum le curseur vers la gauche, et en rediabolisant enfin l’extrême droite. La République doit être protégée des vices, et ce par tous les moyens possibles !
Alors, George Edouard espérait que les autres partis en feraient de même, et avait décidé d’épargner ses critiques contre les camps républicains, même temporairement. Un processus qui enverrait des députés du Parti Populaire à l’Assemblée Nationale ne pourrait être endigué dans le futur !
Plus qu’un meeting pour espérer obtenir des sièges ou conquérir un territoire de toute manière perdu, ce rassemblement visait à préserver la République, en abordant des thèmes récemment oubliés. En effet et puisque le crédo du Parti Populaire était le conservatisme sociétal et la stigmatisation permanente, George Edouard avait choisi d’aborder la défense de tout ce que ces gens attaquaient, dans une sorte de « résumé » de la campagne. Ici, il n’y aurait pas nécessairement de mesures annoncées : en revanche, le réquisitoire contre l’extrême droite aurait bien lieu !
Et puis dans le fond, le candidat à la Primature commençait à sincèrement avoir peur. Peur d’une majorité absolue qui pourrait lui échapper de peu, peur d’une campagne qui s’emballait sur la fin – et ce sans sa propre présence -. Alors et face à la dynamique du centre, l’ensemble des membres de l’Union des Gauches avait été mobilisé : partout dans le territoire, des candidats à la fois écosocialistes et communistes devraient s’exprimer, et défendre un Programme Commun réformateur et ambitieux.
Sans mobilisation, pas d’action ! Conformément à ces propos, le candidat écosocialiste s’était entretenu la veille avec l’ensemble des candidats des circonscriptions de cette ville, pour que ceux-ci débutent ensemble le meeting et fassent une sorte de grande introduction contre l’extrême droite et les ennemis de la République.
Tous et toutes avaient répondu présents ; résolu à combattre les pensées réactionnaires, personne dans le parti ne souhaitait laisser le Parti Populaire l’emporter. Pourtant, la tentation est grande : plus l’extrême droite monte, et plus cela signifie que les partis pouvant briguer une majorité à l’Assemblée diminuent. A court terme donc, c’est une bonne idée ; à long terme, cela signifierait une composition électorale nettement plus marquée vers la droite, avec des thématiques médiatiques outrancières et une fenêtre d’Overton poussée à sa limite.
C’est ainsi que George Edouard se dirigea vers le lieu du meeting tout en conversant avec les candidats présents ; sur le passage du car de campagne, quelques huées venues du camp opposé se faisaient entendre. Etait-il vraiment choqué par l’agressivité d’un camp qui prône cette valeur en modèle de société ? Non, pas vraiment.
Quelques dizaines de minutes plus tard, le car arriva sur les lieux du meeting, et l’équipe organisa l’organisation de ce meeting. Celui-ci devait être important, et placé sous le sceau de la République comme modèle : à plusieurs endroits, des symboles de cette dernière furent donc subtilement déposés. De plus, la chanson traditionnelle de la campagne avait été remplacée par l’hymne ostarien, qui sera donc chanté pour lancer ce rassemblement. L’unité face à l’horreur, il n’y avait que cela de vrai !
Quelques minutes plus tard, la foule se remplissait et le candidat à la Primature était satisfait de constater que malgré ses craintes, ce public soutenait l’Union des Gauches et promettait donc un cadre rassurant pour les candidats de son introduction. Faute de pouvoir l’appliquer avec les autres partis ; ce meeting pouvait être vu comme une sorte de barrage républicain, à échelle réduite.
Bien, le moment tant attendu approchait, quand un membre de la scène s’approcha du candidat écosocialiste, et vint alors se présenter. Il s’agissait d’un syndicaliste ! La peur passée que cela ait pu être un membre du Parti Populaire aux intentions néfastes, c’est avec un réel plaisir que les deux échangèrent du Programme Commun, des intentions communes entre le Kosmostaria et des Ecosocialistes. En effet, ce syndicaliste avait longtemps été communiste ; non pas nécessairement par croyance profonde dans le modèle, mais aussi par opposition à une gauche qui le dégoûtait et qui ne se préoccupait plus ni des travailleurs, ni de l’importance d’une République plus libre. En perdant leurs repères, les Ecosocialistes étaient d’ailleurs allés dans le mur !
Mais l’Union des Gauches ayant été annoncé, ce syndicaliste avait attendu un Programme Commun qui, une fois arrivé, lui avait redonné espoir en l’avenir. Peut-être qu’enfin, les travailleurs seraient aidés et soutenus dans ce pays ! Néanmoins, cette joie fut de courte durée. En effet, Zimmerman était très haut dans les sondages, et aux portes du pouvoir local. Alors, le syndicaliste avait décidé de parler au candidat écosocialiste pour lui demander de ne concentrer ses efforts que contre le Parti Populaire !
Fort heureusement, cela était déjà l’orientation prise par le candidat à la Primature et à un meeting s’annonçant comme un réquisitoire contre Zimmerman, Barnier et monsieur Piniolle. Ces trois figures devaient être égratignées, avec leur incompétence révélée au grand jour ! Observant que la place était maintenant complète et attendait le début du meeting, George Edouard remercia le syndicaliste, et lança donc le meeting.
Ainsi, l’ensemble des candidats se mirent en ligne, formant un « mur » sur la scène et prirent chacun leur tour la parole, dans un rythme soutenu et surtout régulier. Evidemment, la qualité n’était pas particulièrement homogène ; certains candidats brillaient par leur technicité manifeste des dossiers, d’autres plutôt par leur aisance oratoire et la capacité à mobiliser une foule résolument inquiète des sondages de ce territoire.
Et puis, George Edouard parvenait à sentir la peur dans le visage des candidats ; tous et toutes originaires de Brifalle, ceux-ci aimaient donc vraiment la région et ne voulaient pas voir basculer certaines circonscriptions du côté des ennemis de la République. La thématique était libre pour les candidats ; néanmoins, les arguments tournaient essentiellement autour du sujet Zimmerman, et de la défense de la démocratie. Le public, moins enthousiaste mais plus colérique que d’habitude, avait remplacé les applaudissements par les huées contre un ennemi véritablement dangereux et menaçant !
Soudain, un des candidats dit une phrase plus positive, qui suscita une réaction d’espoir du public. Alors, George Edouard sentit qu’il était le moment d’effectuer la transition vers son propre discours ; il leur fit donc un geste leur demandant de conclure. Et monta sur le pupitre. Soulagé de ne plus voir le visage de Zimmerman mais enfin un homme de gauche, rien que son apparition suscita une importante ovation.
Touché mais concentré sur l’importance du réquisitoire qu’il s’apprêtait à donner, le candidat à la Primature les remercia, félicita longuement l’ensemble des candidats présents tout en soulignant l’attachement de chacun à la région de Brifalle. Oui, car il était important de le rappeler : George Edouard était venu épauler l’Union des Gauches dans les différents territoires, pas les supplanter !
Ainsi et après ce moment, George Edouard lança donc l’hymne ostarien, et se mit exceptionnellement à le chanter avec eux, dans un cadre profondément unitaire et solennel. D’ailleurs, les drapeaux de l’Union des Gauches avaient aussi été substitués par le drapeau ostarien ! C’est une ambiance de patriotisme qui régnait dans ce meeting, un patriotisme non pas nationaliste mais bien ouvert vers les autres.
Tout en participant à cette liesse populaire et républicaine, George Edouard observait les réactions de la population, la façon dont se comportait le public et s’ils étaient vraiment réceptifs. La réponse était claire : oui, le public faisait sortir son amour pour le pays, et la peur de voir l’Etat de Droit mourir ! Néanmoins, le candidat à la Primature que le public était moins radical que dans d’autres territoires – à l’image de Bacapy -. Ce chant fut conclu par de longs applaudissements, et le candidat de l’Union des Gauches débuta alors son discours !
Mes amis, mes camarades, mes concitoyens,
Merci de m’accueillir dans ce formidable territoire, et avec un tel accueil ! Quelques minutes avant cet entretien, j’ai eu la chance de m’entretenir avec un membre du public, syndicaliste et qui m’a confié son espoir de voir l’Union des Gauches être née, tout en s’inquiétant viscéralement de voir monsieur Zimmerman être aussi haut dans les sondages. D’ailleurs, celui-ci s’exprimera certainement bientôt ici-même, dans une ambiance inquiétante et absolument immonde de rejet des autres !
Il est franchement désespérant d’observer les mécanismes qui ont amené l’extrême droite à un niveau si élevé aujourd’hui. En effet, les ennemis de la démocratie ne sont pas arrivés par magie à 17% d’intentions de vote selon le dernier sondage Politilab : un enchaînement d’incompétence, de lâchetés et de complaisance est à l’origine de ce drame républicain !
Tout d’abord, la Ligue Républicaine est sans doute le principal parti à l’origine de la montée des idées réactionnaires. Et pour plusieurs raisons ; tout d’abord, monsieur Boulanger en étant au pouvoir, n’a eu de cesse de reprendre leurs thèses, d’accréditer les logiques de stigmatisation avec une idéologie nationaliste dangereuse.
Et puis, quel manque de considération pour la fonction ! Sur le terrain, le parti au pouvoir n’a absolument rien fait pour changer le quotidien des ostariens, a parlé d’insécurité sans jamais lutter véritablement compte et s’est plongée dans une mollesse – qui perdure durant cette campagne -. Pour preuve, la gauche est plus active dans sa lutte contre l’extrême droite, qui menace un bastion de droite !
Et puis, je ne partagerais jamais à ce camp ses négociations avec le Parti Populaire, à l’origine selon moi de l’essentiel des maux que nous connaissons aujourd’hui. Oui, la Ligue Républicaine était prête à travailler avec les ennemis de la République ! En se rendant compte de cela, on peut s’interroger sur leur véritable attachement au modèle républicain, ainsi qu’aux convictions de l’Alternative qui n’ont pas hésité à s’allier à un parti de droite ayant plus que jamais basculé vers d’autres pensées.
Concernant l’Alternative, c’est donc le principal reproche que je lui ferais ; de même, sa stratégie de mise à égalité des « extrêmes » n’a joué que le jeu de l’extrême droite, tentant de marginaliser une gauche républicaine – nous l’avons encore prouvé aujourd’hui – et permettant au Parti Populaire de se positionner contre le parti en place. Vous avez donné des armes à un Parti qui compte bien s’en servir pour mettre à mal nos principes démocratiques !
Je crois d’ailleurs qu’il est important pour tout le monde de revenir aux sources de notre société. Pourquoi nous sommes-nous rassemblés autour d’un Etat, d’un pays et sommes-nous désormais des concitoyens ? Car nous avons une histoire commune, des valeurs communes et auxquelles moi comme l’Union des Gauches n’avons jamais cessé de croire. Ces valeurs, les voici : la République d’Ostaria défend coûte que coûte les libertés, par la défense des individus, de leurs droits et qui s’opposent radicalement à toute notion d’autoritarisme. Pourtant, c’est l’autoritarisme et les idées guerrières que prône le Parti Populaire !
Ensuite, la République c’est aussi une notion d’égalité, à la fois entre les citoyens mais aussi par un Etat-Providence qui se préoccupe de tous et ne plonge personne dans la misère. Force est de constater que sur cette notion, la droite et l’extrême droite se sont perdues, égarées. Mais tout de même, il n’est pas question de les mettre sur le même plan ; le Parti Populaire porte un projet systémique de stigmatisation du parti de nos concitoyens, vit dans le principe d’exclusion et de haine de tout ce qui ne lui ressemble pas ! Pourtant, l’idée même d’Egalité accepte la diversité.
Et puis enfin, la République d’Ostaria, c’est avant tout une société démocratique. C’est une société qui laisse le droit aux citoyens de voter et de choisir, sans les ne mépriser ni vouloir en exclure une partie. D’ailleurs et puisqu’on pourrait m’interroger sur le sujet, je ne tiens pas à exclure le Parti Populaire : les citoyens eux-mêmes sauront se rendre compte que l’extrême droite combat les valeurs qui nous ont permis de nous unir.
La démocratie, c’est aussi l’état de droit, la volonté d’avoir des contre-pouvoirs forts et de négocier plutôt que combattre. La démocratie combat la « justice » de vengeance, ne tombe pas dans la paranoïa et préfère raisonner plutôt qu’être outrancier. La République donc n’est pas d’extrême droite, et ne le sera jamais !
A ces mots et après un long réquisitoire, le public scande le slogan de la République d’Ostaria, hurle « Non à l’extrême droite, oui à la démocratie » et les drapeaux sont remontés. Ceux-ci n’abandonneront pas le combat, et ce jusqu’à la dernière seconde des élections ! Pour autant, George Edouard calme la foule après une minute entière de liesse, et leur demande de se comporter en citoyens responsables. A la différence du Parti Populaire, eux ne répondront pas à la haine par plus de haine !
La foule ayant compris et attendant la conclusion du Candidat à Primature, celui-ci s’exécuta donc et reprit.
Mes amis, je conclurais simplement ce meeting en vous disant que pour que la République l’emporte, il ne faudra pas donner une seule voix à l’extrême droite. Dans tous les territoires, à toutes les élections, aucun siège ne doit aller au Parti Populaire ! Quand nous construisons nos attaques, prenons garde à traiter les différents avec discernement, en reconnaissant les torts de chacun et en se rendant compte que l’extrême droite est sans commune mesure avec le reste.
Et vous, membres de la droite qui ne cessent d’attaquer l’Union des Gauches : n’oublier que le candidat à la Primature que je suis est un écosocialiste réformiste, certainement pas un extrémiste ! Alors, il est primordial de bien discerner qui est un ennemi et qui ne l’est pas, qui est un opposant républicain avec une idéologie différente et qui sort de ce cadre.
Vive l’Etat de Droit, et vive la République d’Ostaria !!
Sur ces mots, le public applaudit longuement le candidat Edouard, salue un réquisitoire à la fois sans aucune tolérance, mais pour autant nuancé. Oui, il avait été dur ; par ailleurs, il n’était pas tombé dans un sentiment qui aurait pu le pousser à généraliser l’ensemble de la droite dans le spectre extrémiste.
Alors, George Edouard prend un temps pour communier avec le public présent, va à la rencontre des militants étant restés sur place et en profite pour parler un peu du Programme Commun, leur détaillant ce que George Edouard allait faire pour son dernier meeting de campagne. Après cet instant, il quitta donc la ville et prit du temps pour se ressourcer, et aborder le dernier virage avant le scrutin.