Allocution inaugurale de la Présidente Lucie Calenbek-Sothriopositi
28 juillet 179
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L'introduction de l'hymne ostarien fut joué sur une vue frontale du Palais d'Yguerne, puis au changement de plan apparut la nouvelle Présidente, apprêtée pour cette occasion historique et portant sur la poitrine une discrète broche de perruche aux côtés de son pin présidentiel, tandis qu'une voix annonça celle qui pendant 6 ans à partir de ce moment commanderait à la destinée du pays.
Mesdames et messieurs, la Présidente de la République.
Chères concitoyennes, chers concitoyens, bonsoir.
Il y a 2 jours, vous m'avez fait l'honneur de faire de moi la Présidente de la République. Votre Présidente. Et de m'avoir aussi fait l'honneur d'être la première femme à servir notre pays à cette fonction.
On ne dira plus qu'en Ostaria, une femme ne peut pas réussir en politique, une femme ne peut pas atteindre des sommets, une femme ne peut pas se mesurer à un homme et se montrer meilleure que lui. Il y a encore du chemin à faire pour que le travail des femmes dans la politique ostarienne autant que dans le reste de notre société soit mieux considéré, dans la dignité à laquelle chaque citoyenne et chaque citoyen a droit et mérite. Mais cette avancée est une avancée dont nous pouvons être fière, et principale intéressée que je suis, je ne peux que me présenter humblement devant vous et vous promettre de tout faire pour être à la hauteur de ce privilège que vous me faites. Il n'est pas de plus grande manière de servir son pays que d'écouter son appel, et de tout donner pour lui, peu importe qui l'on est ou d'où l'on vient.
Je tiens à saluer la démission anticipé de mon prédécesseur. Cette preuve de respect d'un ultime scrutin en sa défaveur l'honore et je suis heureuse de voir que le blocage de la transition que certains auraient pu craindre n'a pas eu lieu.
Hier donc, j'ai été investie, j'ai nommé mon cabinet, reçu les félicitations des gouvernements de nombreux pays, de Narois au Saphyr en passant par la Fédération-Unie et l'Union Phoécienne, j'ai pris contact avec les différentes institutions nationales et ai commençé à examiner les listes de candidats pour pourvoir aux postes administratifs à la charge de la Présidence et laissés vacants à la dernière mandature.
J'ai pris mes fonctions et commencé à esquisser la feuille de route de mon administration pour les 6 années à venir. Et je sais que beaucoup attendent de savoir quelles lignes guideront le mandat de la première Cheffe d'État de notre Histoire, certains avec impatience, d'autres avec crainte et appréhension.
Lors de l'investiture de mon prédécesseur, celui-ci a déclaré qu'il était naturel pour lui de destituer l'Assemblée Nationale en cours car son élection prouvait par nature le changement de majorité et donc la nécessité de dissoudre la représentation en cours, conséquemment illégitime.
Je sais que l'on attend, de mon bord comme de l'autre, que j'imite mon prédécesseur, et que je dissolve donc l'Assemblée sans tenter le moins du monde de composer avec la représentation en place. Cette élection, suite logique d'une demi-douzaine de référendums qui témoignait déjà du changement de majorité dans l'opinion publique, montre également un profond changement dans la volonté de notre peuple et une rupture avec l'ancienne majorité.
Mais ce qui m'a défini lors de cette élection, c'est ma volonté de rupture avec l'hyper-présidence, et je me tiendrais à mes promesses, cela me semble essentiel pour permettre à nos citoyens de retrouver confiance en notre classe politique. Je ne pourrais pas agir de la sorte sans porter atteinte à la légitimité du scrutin qui a fait élire les représentants, ainsi qu'à mes promesses envers les électeurs et mes propres convictions.
J'ai invité le Premier Ministre en fonction à former un gouvernement d'unité, un gouvernement qui rassemblerait l'ancienne majorité devenue minorité, de même que les composantes de la majorité actuelle. Un gouvernement qui s’appuierait à la fois sur la représentation parlementaire et sur la représentation populaire. Ce soir, à 18h, au terme de 48h de négociations, il sera chargé de me transmettre sa proposition de gouvernement, qui devra recevoir l'aval d'une majorité de partis au sein de l'hémicycle. Dans le cas contraire, j'userai de mes prérogatives afin de nommer un autre Premier Ministre qui sera à son tour chargé de proposer un gouvernement d'unité nationale.
Comme garante des institutions, il m'apparaît nécessaire de travailler avec les institutions en place au moment de mon élection. Je ne crois pas en le mythe du Président qui renverse tout si-tôt son élection certifiée, quitte à blesser la démocratie pour panser son ego.
J'ai foi en la représentation actuelle pour mettre de côté les si basses querelles de pouvoir et travailler à l'intérêt collectif. Si elle ne s'avère pas capable d'y parvenir - mais je crois en nos représentants et en l'ancienne majorité pour que cela n'arrive pas - j'userai de mes prérogatives afin de débloquer des institutions meurtris par tout un mandat d'affrontement et de jeux de pouvoirs. Le pouvoir de dissolution est laissé à la discrétion de la Présidence, mais je ne veux pas en user par pur intérêt politique, aussi ne sera-t-il qu'un dernier recours si la représentation actuelle faillit à mettre en place une gouvernance d'unité et d'apaisement.
J'ai également invité le Premier Ministre à retirer son projet de réforme constitutionnel, préparé à la va-vite en réaction à cette élection historique dans lequel le peuple s'est exprimé en toute légitimité. Monsieur Constant m'a donné la garantie de retirer son projet et, dans la soirée, je solliciterai le Président de l'Assemblée Nationale afin qu'une commission parlementaire soit ouverte, visant à préparer une réforme unique de notre loi fondamentale, proposée en un référendum unique, réforme majeure de mon mandat de Présidente à laquelle j'aspire à participer.
Réformer notre Constitution m'apparaît être une grande priorité de ce mandat. Mais une telle réforme ne pourra se faire de manière apaisée si elle n'est que le fruit d'une opposition contre-productive à chaque scrutin populaire. Le changement de nos règles du jeu démocratique doivent être le fruit d'un travail de concert dans l'intérêt. On ne change pas les règles du jeu démocratique en fonction de ce qui nous arrange et d'où on se place dans l'hémicycle, mais en fonction de ce qui bénéficie à la démocratie et au final, au peuple ostarien.
S'il y a consensus entre les législateurs, cette réforme sera ensuite proposée au vote populaire. Et s'il ne peut y avoir de consensus entre les groupes parlementaires, représentatifs de la Nation, un référendum consultatif sera tenu pour connaître la nature du régime que nous tous, citoyens, désirons mettre en place dans cette élection.
Je sais avoir recueilli le soutien de présidentialistes. Je sais avoir recueilli le soutien de parlementaristes de droite ou de gauche modérés. Je sais avoir recueilli le soutien de monarchistes constitutionnalistes. Je sais également avoir recueilli le soutien de ceux qui avaient votés pour mon prédécesseur à la précédente élection et qui ont été déçus de sa présidence.
Je n'ai pas été élue pour être Présidente d'une majorité ou d'un parti, mais pour être la Présidente de toutes les Ostariennes et de tous les Ostariens.
La Haute Cour Constitutionnelle sera bientôt chargée de l'organisation du scrutin municipal. Je solliciterai celle-ci pour permettre à ces élection municipales de déterminer également la représentation des différentes régions de notre pays. Nous n'avons pas eu d'élections régionales dignes de ce nom depuis la Présidence de Jérôme Plassel - que le Sort l'accompagne. Il est temps de restaurer les pouvoirs dévolus à nos territoires et de décentraliser une gouvernance qui avec. La loi s'applique partout, mais un gouvernement ne peut l'exécuter à chaque endroit du pays de la même manière, en gommant les spécificités de chacun de nos territoires. Au terme de ces élections municipales, je demanderai donc à la Haute Cour Constitutionnelle de permettre la formation de conseils régionaux et l'élection des exécutifs locaux. La démocratie des communes et des régions est une part importante de ce qui fait notre République et nous ne pouvons la laisser être son parent pauvre.
Concernant l'état de guerre dans lequel notre pays est plongé depuis déjà trop d'années, mon attachement à son achèvement n'a jamais été un secret et c'est à cette conviction pacifiste mais ferme que je me tiendrais.
Dans la semaine, le Chef d'État-Major de nos Forces Armées sera chargé de prévoir le rapatriement de toutes nos troupes déployées à l'étranger. Il sera chargé de l'organisation d'une cérémonie en hommage aux disparus de la guerre. De mon côté, je travaillerai à un décret-loi visant à la création d'un Ordre honorant ceux qui ont donné d'eux-mêmes pour la Nation ostarienne. Ce n'est pas parce que nous voulons mettre un terme aux sacrifices vains dans des guerres inutiles que nous devons passer sous silence ceux qui ont péris au service de la République. Bien au contraire, c'est parce que nous attachons de l'importance à la vie de chacun de nos concitoyens, y compris ceux qui ont fait le choix de passer leur vie au service de la Nation, que nous honorerons et que nous ferons le nécessaire pour qu'aucune autre goutte de sang n'ait à être versée pour autre chose que d'empêcher plus de sang d'un citoyen ostarien d'être répandu.
Nous poursuivrons la guerre contre le Califat Eibadique jusqu'à son terme. Mais nous nous emploierons à poursuivre cette guerre en collaboration avec nos alliés dans la région, c'est à dire avec ceux qui poursuivent les mêmes objectifs que nous, sans considération pour quelqu'agenda caché que ce soit. Nous ne nous impliquerons pas dans la guerre civile qui oppose un camp à l'autre dans la région. Une fois la destruction du Califat actée, nous nous retirerons définitivement. Et sous mon mandat, nous ne déclarerons plus la guerre que si par malheur notre Nation ou un de ses alliés venait à être attaqué par des ennemis de l'extérieur, auquel cas, je fais le serment de continuer à défendre la Nation de toutes mes forces et jusqu'à mon dernier souffle. Mais tant que cela est possible, la recherche sincère de la paix est également une promesse à laquelle je me tiendrais.
Sur le plan diplomatique, j'ai déjà pris contact avec des dirigeants étrangers, et je profite de cette allocution pour inviter solennellement et officiellement Sa Sérénissime Majesté Impériale l'Empereur de Narois à Lunont, au Palais d'Yguerne, où il sera reçu pour discuter d'avenir. Nous rescellerons de manière perpétuelle l'alliance qui a unit notre République et leur Empire dans un même mouvement de l'Histoire.
J'ai également invité le dirigeant de la Dorée à Yguerne pour une conférence au cours de laquelle j'acterai la reconnaissance de la souveraineté de la Dorée et un traité de coopération pour aider à rebâtir cette nation avec laquelle, par la dessein du Sort, nous partageons un destin commun. Cette destinée doit être une force qui nous pousse à racheter les erreurs passées pour bâtir un lendemain meilleur.
En collaboration avec le Ministère des Affaires Étrangères qui sera nommé, nous normaliserons les relations qui doivent être normalisées, nous scellerons les amitiés qui ont lieu d'être et nous reprendrons une coopération équitable avec les autres nations actrices de la scène internationale, dans le plein respect de la souveraineté du peuple ostarien, dont je me fais la représentante devant le Monde. Nous serons ce que nos fondateurs voulaient que notre République soit : des défenseurs de la paix et de la démocratie, des acteurs guidés par la motivation de bâtir un monde meilleur pour nous mêmes et pour nos enfants.
J'en appelle à toutes les forces qui ont bataillés les unes contre les autres au cours des 10 dernières années. Nous pouvons continuer encore longtemps de nous déchirer les uns les autres, de transformer nos assemblées et nos conseils en champs de batailles, mais les champs de batailles se transforment rarement en autre chose qu'en champs de ruines.
Le peuple ostarien est grand, le peuple ostarien est juste, il ne saurait être un ennemi pour lui-même ou autre chose que le maître sa propre destinée. On ne bâtit pas une oeuvre collective aussi grande que cette République sur le sang et la haine. Alors l'ordre doit être rétabli. La paix doit être redéclarée. La démocratie doit être restaurée. Ce sera un travail difficile et qui nécessitera des efforts de chacun des dirigeants en place. Mais je crois en la grandeur de notre démocratie et en sa capacité d'apporter le meilleur à notre pays. Et plus que tout, je crois en l'avenir de notre Nation dont vous avez décidé hier et à laquelle, plus que jamais, je me sens fière et heureuse de présider.
Vive la République, vive la Nation et vive Ostaria !