Bureau du Président de la République

[Jeffrey Simkos]

Ne recevant aucune réponse de la présidente, Jeffrey poursuivit une autre question suite à un message qu'il reçut sur son téléphone.

Madame la présidente, suite à l'adoption de la loi qui amnistie les mineurs de la guerre civile. Le service m'informe à l'instant du retour des Delfrous à Brifalle. Je souhaiterais avec votre permission déployer une surveillance accrue sur la côte avec un sous-marin et également des drônes qui survoleront discrètement la demeure car ils pourront être un danger pour le pays.

[Lucie Calenbek-Sothriopositi]

La Présidente regarda fixement le Directeur Simkos, dont elle n'avait encore jamais vu le regard - un privilège sûrement réservé à une rare élite.

Lucie Calenbek-Sothriopositi : Concernant nos forces de l'ordre, elles seront je pense nettement moins sollicités jusqu'à l'annonce du prochain gouvernement, que je chargerai de proposer un plan de restructuration et de rééquipement pour pallier aux manques auxquels nos policiers et nos gendarmes ont pu faire face sous les derniers mandats. Je ne peux hélas pas faire beaucoup plus en l'absence d'une majorité à l'Assemblée Nationale pouvant désigner un gouvernement.
Pour nos forces armées, je négocierai avec nos alliés dans le conflit en cours pour limiter l'implication de nos effectifs. Nous avons déjà perdu bien trop d'hommes dans ce conflit, hélas. Pour ce qui est de l'organisation, à nouveau, ce sera la charge du prochain gouvernement. Mais en tant que commandante-en-chef, je veillerai à ce que nos soldats soient traités avec dignité et convenablement équipés plutôt que d'aller les sacrifier sur un théâtre étranger.
J'aurais à ce sujet besoin que vous preniez contact avec la FIA fédérée, la DASC saphyrienne, le Komisnatsi Komna novgradois et le Nyānąam laurésien. Si nous voulons combattre efficacement nos ennemis communs, je pense qu'il serait utile de mettre en place une cellule internationale de contre-terrorisme regroupant les agences de renseignements impliqués.
Lorsque cela sera fait, j'aimerai un rapport détaillé des principales menaces qui pèsent sur la sécurité nationale ainsi que les recommandations de vos services.

Elle se servit un café en écoutant le Directeur Simkos parler des Delfrous, puis elle répondit.

Lucie etc... : Concernant M. Delfrous, je ne pense pas qu'il soit judicieux d'en faire un ennemi de l'État pour le moment. Depuis son enlèvement par le Califat, l'opinion publique pourrait se montrer compatissante à son égard, et la loi d'amnistie l'exonère de tous les crimes de la monarchie. Je n'aime pas plus que vous la monarchie et j'ai comme beaucoup un souvenir amer de l'ère Delfrous. Toutefois, nous devons agir en état de droit, c'est ce qui nous différencie de la période absolutiste que nous avons subi.
Que la garde côtière se tienne à l'écart, mais qu'elle renforce ses contrôles sur tout ce qui pourrait entrer ou sortir dans le périmètre. Pareil pour vos hommes, surveillez toutes les sorties et entrées, et si possible, interceptez les communications sortantes et entrantes, toujours en vous tenant à bonne distance. En dehors de potentiels contacts avec des puissances étrangères qui pourraient l'armer ou lui permettre de conspirer contre la République, M. Delfrous reste un citoyen ostarien comme un autre, c'est pourquoi je veux que nous nous concentrons d'abord là-dessus.
Et pour nos drones, pour le moment, je préférerais qu'ils soient prêts à être déployés à l'étranger si le conflit dans le Dawwfiq venait à se prolonger. Nous n'avons pas grand chose à observer dans ce château.

[Aya Leclerc]

La présidente fédérée, Jenny Howard, entra dans le bureau à la suite d'Aya Leclerc, qui lui proposa l'un des fauteuils, et s'assit dans un autre, à côté d'elle.

Aya Leclerc : J'espère que vous avez fait bon voyage.

Je suis très heureuse de pouvoir commencer mon mandat en vous rencontrant. Les relations diplomatiques ostaro-fédérées – comme, il faut bien le dire, les relations diplomatiques ostariennes en général – ont été mises sous sommeil pendant bien trop longtemps. Je sais que nous pouvons mettre fin à ce malheureux état de fait et repartir sur des bases solides.

Au fait, voulez-vous quelque chose à boire ?

[Jenny Howard]

Le voyage fut excellent, je vous remercie.

Madame la Présidente, permettez-moi tout d'abord de vous féliciter pour votre élection à la tête de la République d'Ostaria. Votre élection ouvre une véritable période d'espoir, tant pour votre pays que pour les relations bilatérales qui l'unissent au mien. Je ne peux que me réjouir de la victoire d'une femme modérée, pour en être une moi également.

J'aimerais également, au nom de mon pays, présenter mes plus plates excuses pour la piteuse représentation diplomatique qui fut la notre dans ce pays pendant des années avec l'Ambassadrice Bachmann. Elle a contribué à une détérioration inutile de nos relations et je m'en excuse. J'ai en revanche toute confiance en l'Ambassadeur Harper nommé par ma prédécesseure. Je suis convaincue que nous pouvons, peut-être même dès aujourd'hui, nous accorder sur des points clés pour améliorer notre relation bilatérale.

Je prendrai bien un verre d'eau s'il vous plaît !

[Aya Leclerc]

On apporta deux verres d'eau.

Aya Leclerc : Ravie de voir que nous sommes sur la même longueur d'onde. Nous avons beaucoup à faire, mais nous y parviendrons. Par quoi souhaiteriez-vous commencer ?

[Jenny Howard]

Madame la Présidente, je pense que nous devons nous mettre d’accord sur une plus grande coopération sur le plan sécuritaire. Je soutiens un traité qui établirait une plus grande coopération de nos deux nations pour combattre le crime chez nous, avec par exemple un partage partiel de nos renseignements et la mise en place d’une procédure d’extradition complète pour que nos systèmes judiciaires respectifs soient efficaces.

[Aya Leclerc]

Aya Leclerc : Ce n'est pas moi qui m'opposerait à cela, au vu des évènements qui ont touché Ostaria l'année dernière … Je suis tout à fait d'accord avec cette initiative.

De mon point de vue, il faudra aussi renforcer nos liens économiques, notamment par le biais d'un traité de libre-échange, qui, je pense, profiterait largement à nos deux pays.

[Jenny Howard]

Si nous sommes d'accord sur la coopération sécuritaire, je chargerai mon Administration de commencer à rédiger des propositions autour desquelles nous pourrons travailler dès notre prochaine rencontre.

Concernant la coopération économique, je suis d'accord sur la nécessité de la développer mais je ne peux rien promettre en matière de libre-échange, le Sénat pourrait chez moi me critiquer pour cette décision et il faudra que je consulte des sénateurs avant de pouvoir m'engager davantage.

[Aya Leclerc]

Aya Leclerc : Très bien. Si vous n'avez rien à rajouter, nous pouvons nous arrêter là, je suppose.

[Aya Leclerc]

Aya Leclerc attendait debout et pensive face à sa fenêtre – une posture très présidentielle, pensait-elle. Après les élections générales de la veille, elle avait invité le candidat à la Primature de l'Union des gauches, George Édouard, pour l'inviter au Palais d'Yguerne, afin de discuter de la formation d'un gouvernement.

On toqua à sa porte, qui s'ouvrit, laissant entrer l'invité. Aya Leclerc, se retournant et quittant ses pensées, marcha vers lui et lui serra la main, avec un sourire amical. Même si George Édouard n'était pas, pour elle, le Premier Ministre rêvé, elle savait que, si elle devait travailler avec lui pendant quatre ans – jusqu'à la fin de son propre mandat, donc –, maintenir des relations cordiales était une nécessité absolue.

Aya Leclerc : Bonjour, monsieur Édouard, et encore félicitations pour votre victoire.

Elle l'invita à s'installer face à elle, qui prenait sa place habituelle à son bureau. Pour l'occasion, elle avait provisoirement rangé tous les dossiers "Oxanna" encore sur son bureau dans une bibliothèque sur le mur droit de la pièce – de son point de vue –, qui était désormais presque réservée à la guerre d'Oxanna.

Aya Leclerc : Vous voulez boire quelque chose ?

Après avoir – ou non, selon la réponse de son interlocuteur – appelé un serveur pour lui demander d'apporter la – sans nul doute exquise – boisson commandée par le candidat à la Primature, elle commença.

Aya Leclerc : Monsieur Édouard, comme vous le savez, j'ai reçu, ce matin, la démission du gouvernement. Suite aux résultats des élections, je vous ai invité pour tenter de définir un gouvernement susceptible de recueillir la confiance de l'Assemblée Nationale, aussi bien que la mienne. En tant que candidat à la Primature de l'Union des gauches, vous êtes bien sûr, si, comme je n'en doute pas, cela est votre souhait, la personnalité la plus légitime pour conduire un tel gouvernement.

Ainsi, j'aimerais savoir, premièrement, si vous accepteriez une nomination au poste de Premier Ministre, et, deuxièmement, le cas échéant, quelle forme vous souhaiteriez donner à un tel gouvernement. Ceci incluant aussi bien les formations politiques conviées que les personnalités qui en seraient membres, ainsi que la répartition des domaines de compétence, et les lignes directrices de l'action de ce gouvernement – à moins qu'il ne soit restreint à la seule Union des gauches, auquel cas j'ai eu l'occasion de prendre connaissance de son programme commun.